En 1984, le lot d’un immeuble en copropriété est divisé en plusieurs lots. Une assemblée générale de 2011 conteste la légalité du modificatif de l’état descriptif de division du 30 mai 1984 et exige sa rectification. Le propriétaire d’un des lots issus de la division assigne le syndicat des copropriétaires en annulation de cette résolution. Le syndicat des copropriétaires invoque l’inopposabilité à son égard de l’acte du 30 mai 1984.

La cour d’appel rejette la demande du syndicat, au motif que le syndicat ne peut contester, 27 ans après sa publication, l’acte modificatif du 30 mai 1984 qui contient la répartition des quotes-parts de parties communes et des charges entre les lots issus de la division, quand bien même elle n’a pas été approuvée par une assemblée générale, le délai de prescription des actions personnelles dans une copropriété étant de dix ans et l’imprescriptibilité ne concernant que les demandes tendant à voir déclarer non écrite une clause d’un règlement de copropriété, ce qui ne peut être effectué que par le juge.

L’arrêt est cassé : l’article 43 de la loi 65-557 du 10 juillet 1965 n’interdit pas à l’assemblée générale de reconnaître le caractère non écrit d’une clause d’un règlement de copropriété et un copropriétaire ou le syndicat des copropriétaires peut, à tout moment, faire constater l’absence de conformité aux dispositions de l’article 10, alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 de la clause de répartition des charges.

La solution est nouvelle. Les clauses contraires à certaines dispositions de la loi de 1965, et notamment celles relatives aux règles de répartition des charges, sont réputées non écrites (Loi 65-557 du 10-7-1965 art. 10 et 43). L’assemblée générale peut-elle déclarer non écrite une clause du règlement de copropriété ou ce pouvoir appartient-il exclusivement au juge ?

Lorsque le juge répute non écrite une clause relative à la répartition des charges, il procède à leur nouvelle répartition (Loi 65-557 du 10-7-1965 art. 43, al. 2). Faut-il en déduire que seul le juge a le pouvoir de réputer une clause non écrite ? L’assemblée générale est normalement compétente pour modifier un règlement de copropriété (Loi 65-557 du 10-7-1965 art. 26, b) ou pour l’ « adapter » (Loi 65-557 du 10-7-1965 art. 24, II-f). Ne peut-elle pas, également, déclarer non écrite une clause de ce règlement et décider de son retranchement ? C’est en ce sens que statue la Cour de cassation dans cet arrêt publié, en reconnaissant à l’assemblée générale le pouvoir de déclarer non écrite une clause du règlement de copropriété. Cette solution permet d’éviter la saisine systématique d’un juge, lorsque l’assemblée générale peut dégager une majorité pour « supprimer » la clause qui contrevient aux dispositions de la loi du 10 juillet 1965. La précision de l’alinéa 2 de l’article 43 sur le rôle du juge n’exclut pas la compétence de l’assemblée générale.

Il en résulte que, comme c’est le cas lorsque le caractère non écrit est constaté par le juge, l’absence de conformité d’une clause aux dispositions impératives de la loi de 1965 peut être constatée à tout moment par l’assemblée générale sans être enfermée dans le délai de prescription de l’article 42. En effet, l’action en nullité des clauses d’un règlement de copropriété non conformes aux dispositions d’ordre public de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 n’est pas soumise à la prescription décennale édictée par l’article 42 de cette loi (Cass. 3e civ. 13-6-1984 n° 82-16.492 : Bull. civ. III n° 115 ; Cass. 3e civ. 1-4-1987 n° 85-15.010 : Bull. civ. III n° 69 ; Cass. 3e civ. 26-4-1989 n° 87-18.384 : Bull. civ. III n° 93 ; Cass. 3e civ. 7-5-2008 n° 07-13.409 FS-PB : BPIM 3/08 inf. 244).

Les Hauts Magistrats ont encore précisé, au visa des articles 10, alinéa 1er et 43 de la loi du 10 juillet 1965, qu’il résulte de ces textes que tout copropriétaire peut, à tout moment, faire constater l’absence de conformité aux dispositions de l’article 10, alinéa 1er de la loi du 10 juillet 1965 de la clause de répartition des charges, qu’elle résulte du règlement de copropriété, d’un acte modificatif ultérieur ou d’une décision d’assemblée générale, et faire établir une nouvelle répartition conforme à ces dispositions (Cass. 3e civ. 28-1-2016 n° 14-26.921 FS-PB : BPIM 2/16 inf. 127). Cette imprescriptibilité a donc vocation à s’appliquer de la même façon, que le caractère non écrit soit constaté par un juge ou par l’assemblée générale.

Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Gestion immobilière n° 36270

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Cass. 3e civ. 10-9-2020 n° 19-17.045 FS-PBI