Lorsque le salarié victime d’un accident du travail est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des représentants du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise (C. trav. art. L 1226-10).

Depuis 2015, la chambre sociale de la Cour de cassation admet qu’à l’occasion du dialogue s’instaurant entre l’employeur et le médecin du travail, les avis formulés par ce dernier, postérieurement à la constatation de l’inaptitude définitive du salarié à son poste de travail, permettent au premier de justifier de l’impossibilité de reclasser l’intéressé sur un quelconque poste (Cass. soc. 15-12-2015 n° 14-11-858 F-PB : RJS 2/16 n° 103 ; Cass. soc. 3-5-2018 n° 17-10.234 FS-D : RJS 7/18 n° 474). Un arrêt rendu le 6 janvier 2021 par la Haute Juridiction rappelle ce principe dans une affaire où les faits sont antérieurs au 1er janvier 2017, date d’entrée en vigueur de la loi 2016-1088 du 8 août 2016, dite loi Travail.

A noter : On relèvera que depuis l’intervention de la loi Travail l’employeur est dispensé de l’obligation de rechercher un reclassement si le médecin du travail indique expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé de l’intéressé fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi (C. trav. art. L 1226-12).

L’avis du médecin du travail sur le reclassement peut aider l’employeur à remplir son obligation

En l’espèce, un conducteur livreur victime d’un accident du travail est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail et licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement en 2014. Reprochant notamment à son employeur un manquement à son obligation de reclassement, il saisit la juridiction prud’homale afin de contester le bien-fondé de la rupture de son contrat de travail.

Estimant avoir rempli son obligation, l’employeur fait valoir à l’appui de sa défense qu’après la déclaration d’inaptitude du salarié, il a sollicité le médecin du travail pour avoir son avis sur un poste de conducteur ZC SPL de nuit et sur un autre d’employé administratif polyvalent dans le cadre du reclassement du salarié. Celui-ci lui a alors répondu que sur les deux postes envisagés, celui d’employé administratif était le mieux adapté. Il a alors de nouveau sollicité des conclusions écrites du médecin du travail sur le poste de conducteur ZC SPL et ce dernier lui a répondu par courriel que ce poste n’était pas compatible avec les restrictions actuelles du salarié.

Pour juger que la société n’a pas rempli avec loyauté son obligation de reclassement et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d’appel retient que le courriel du médecin du travail précisant, sur interrogation de l’employeur, que le poste de conducteur ZC SPL n’est pas compatible pour le moment avec les restrictions du salarié, ne peut pas valoir avis d’inaptitude. Selon elle, à défaut d’en avoir eu connaissance, le salarié n’a pas été en mesure d’exercer un recours auprès de l’inspecteur du travail et l’employeur a manqué à son obligation en ne proposant pas au salarié le poste disponible de conducteur ZC SPL.

Le médecin du travail peut valablement donner son avis sur le reclassement par courriel

La Cour de cassation ne partage pas l’analyse des juges du fond et censure leur décision. Après avoir rappelé les dispositions de l’article L 1226-10 du Code du travail, elle confirme que les réponses apportées postérieurement au constat régulier de l’inaptitude, par le médecin du travail sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l’employeur de l’impossibilité de remplir cette obligation. Peu importe à ce titre, et c’est une précision qui est apportée par cet arrêt, que ces réponses soient apportées par courriel.

Pour en savoir plus sur l’inaptitude physique du salarié : Voir Mémento social nos 49960 s.

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Cass. soc. 6-1-2021 n° 19-15.384 F-D